Publié le 13 juin 2010
Publié le 12 juin 2010 à 10h32 |
Diane Tell: Via Vian, revient le jazz !
Via Vian, Boris de son prénom, revient le jazz chez Diane Tell. Docteur Boris & Mister Jazz est un projet inédit, exclusivement constititué de grands standards adaptés par l’écrivain disparu.
«J’ai aimé le jazz dans ma jeunesse, j’ai décroché un peu par la suite. Je m’y replonge maintenant. C’est vrai que j’ai beaucoup à réapprendre», explique Diane Tell, jointe à Biarritz, là où elle vit depuis une mèche. Toujours cette lumière dans la voix. Cette curiosité. Ce sens de l’émerveillement. Elle dit revenir au jazz, on n’y voit pas une miette d’opportunisme.
Il faut avoir vécu la fin des années 70 pour se rappeler que Diane Tell avait d’abord fait dans le jazz-pop. Souvenez-vous de la chanson Les cinémas-bars, de ce premier album qui l’avait ensuite menée à créer de petits classiques locaux tel Gilberto. À être accompagnée par Uzeb, le groupe jazz-fusion de l’époque avec lequel elle a fréquenté la cime de notre palmarès, pour ensuite se barrer de l’autre côté de la flaque et adopter ce Pays basque dans lequel elle a pris racine.
«Il y a trois ans, raconte-t-elle, j’ai voulu faire un album de jazz. Évidemment, j’avais envie de trouver une idée originale. Parce que bon, faire des reprises en américain, ça n’a pas tellement d’intérêt. Et donc, j’ai survolé ce qui s’est chanté en français. Je n’ai pas trouvé grand-chose, sauf évidemment Claude Nougaro, Michel Legrand…
«Or, la chanson Toi qui a pris mon coeur, le standard My One and Only Love adapté par Vian, je la faisais déjà avec Robbie (McIntosh) en duo depuis près de 15 ans. Je me suis dit alors, si Boris Vian a fait cette adaptation, il y en a peut-être d’autres. Dans un recueil de 500 textes de Vian, j’ai finalement débusqué près d’une trentaine d’adaptations de standards américains.
«Pour la plupart, il les avait écrits vers 1958 et 1959, soit peu de temps avant sa mort. J’ai trouvé ces textes très purs, très beaux, très simples. Superbes dans la sonorité, très agréables à chanter. On comprendra que Boris Vian était un grand connaisseur de jazz, donc en mesure de créer des textes parfaitement adaptés au phrasé de ces mélodies.»
Diane Tell avait de la chance, puisque seules deux chansons de ce répertoire inédit avaient été enregistrées: Nana’s Lied reprise par Diane Dufresne pour son projet Kurt Weill, et Ma chansonnette interprétée par Henri Salvador.
«Pour le reste, rien! Elles étaient restées dans les cartons, après quoi le yé-yé est arrivé… J’ai donc eu la chance d’être la première à vraiment explorer ce matériel. J’ai d’ailleurs rencontré Michèle Vian, la première femme de Boris, qui ne savait même pas l’existence de ces adaptations! Ensuite, ce ne fut pas une mince tâche que d’obtenir le droit de faire cet album, contacter les éditeurs américains. Travailler avec un spécialiste français des vieilles partitions de jazz (Philippe Beaudoin) afin de remonter aux mélodies originelles, telles que Vian les aurait entendues à l’époque.»
Enregistré en France (sous étiquette Celluloid), Docteur Boris&Mister Vian fut mixé au Japon et masterisé à Londres. «Pour le son, indique l’autoproductrice, j’ai mis le paquet. Que ça sonne vraiment bien même si c’est discret dans l’approche. C’est comme un film où il n’y a pas d’effets spéciaux!»
Pour cette soirée dominicale au Théâtre Maisonneuve, elle proposera 13 adaptations de Boris Vian… et quelques reprises de Diane Tell. Choisi pour sa propension à la chose littéraire en plus de la qualité de son jeu sur les ivoires, le pianiste français Laurent de Wilde la secondera. Triés sur le volet, des musiciens québécois compléteront la formation: le batteur Robbie Kuster, le bassiste Éric Auclair, le guitariste Jean-Sébastien Williams.
Est-il besoin d’ajouter que ce tour de chant pourrait fort bien être présenté au Festival de jazz plutôt qu’aux FrancoFolies?
«Mais complètement! répond la principale intéressée. Au départ, je m’étais proposée pour le jazz et on m’a quand même conseillé de faire les Francos; on croyait que j’y attirerais plus de monde. En tout cas, les gens seront surpris car j’y ferai tout l’album et deux autres titres du même acabit. Si je refais des chansons de mon passé, ce sera en rappel.»
Est-ce à dire que Diane Tell retourne définitivement au jazz? Nul ne le sait, elle non plus.
«En tout cas, ça va me motiver pour écrire mes prochains textes. Pour l’instant, j’ai pensé qu’il était urgent que ces chansons existent. Pour moi c’est la découverte d’un trésor. Un coup de foudre.»
Diane Tell présente Docteur Boris&Mister Vian, demain, 20h, au Théâtre Maisonneuve; programme double avec Andrea Lindsay.
Alain Brunet
La Presse
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